#7 Claude Chabrol


CLAUDE CHABROL
"Le suspense au féminin en 5 films"

L’Enfer, La Cérémonie, Rien ne va plus,
Merci pour le chocolat, La Fleur du mal
par Antoine De Baecque

Claude Chabrol a dit son intérêt profond pour les femmes en tant que cinéaste. « La femme est plus intéressante que l’homme, confiait-il. Une femme dans son quotidien devient un vrai sujet. Et une femme étrange, criminelle, mystérieuse, devient LE sujet. » Le projet du cinéaste, durant les vingt dernières années de sa vie et ses seize derniers films – dont onze sont centrés prioritairement sur un ou des personnages féminins –, consiste à faire circuler ces femmes entre leur univers quotidien et des situations exceptionnelles, afin de les faire osciller, comme il le dit, entre « un vrai sujet » et « LE sujet ».

Dans les cinq films de ce volume, il existe quelques points communs : trois sont joués par Isabelle Huppert, entrant directement dans le corpus des sept « Huppert’s films » chabroliens ; trois sont des films de femmes criminelles, autre genre majeur du système de Chabrol, qui regroupe huit opus ; enfin, tous sont fondés sur un suspense : un mystère non élucidé dont le film propose, d’une manière où une autre, la résolution. Suspense fabriqué de toute pièce par la jalousie maladive dans L’Enfer, par la lutte des classes autour de la question de l’analphabétisme dans La Cérémonie, par le contenu d’une étrange mallette dans Rien ne va plus, par l’empoisonnement et l’envoûtement de la musique dans Merci pour le chocolat, et par le retour des secrets de famille dans La Fleur du mal.

Chabrol ne fait pas qu’accompagner une évolution sociétale en donnant plus de place aux femmes dans ses films, il choisit, plus profondément, de féminiser son cinéma. Il s’entoure de femmes pour travailler, scénaristes, techniciennes, actrices. Cela concerne aussi la manière de regarder ses personnages évoluer dans leur contexte social, familial, sentimental, et la façon même de tourner, de mettre en scène et de raconter une histoire – le suspense au féminin. Voici une veine féconde : la part féminine de l’oeuvre de Chabrol, avec pour figures centrales des femmes, souvent victimes et parfois criminelles.

Antoine de Baecque est historien du cinéma et critique. Il a dirigé les Cahiers du cinéma et les pages culturelles de Libération. Auteur de nombreux ouvrages sur l’histoire et le cinéma, notamment des biographies de Truffaut, Godard, Rohmer, Melville, et des essais : La Nouvelle Vague, portrait d’une jeunesse ou L’Histoire-caméra. Il est professeur en études cinématographiques à l’Ecole normale supérieure de la rue d’Ulm et achève actuellement une biographie de Claude Chabrol (Stock).
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